Le cerveau, satisfait ou compensé
S’il y a un truc que l’on apprend quand on veut faire de l’intelligence artificielle, c’est que les processeurs neuronaux adaptent leurs signaux d’entrée afin d’obtenir un résultat. De ce fait, à la différence d’une équation mathématique, on recherche la formule à partir du résultat et non l’inverse.
Par cette révélation, j’ai eu ce déclic dans ma petite tête d’amibe évoluée : le fonctionnement cérébral ne peut reposer que sur deux mécanismes fondamentaux : satisfait ou compensé.
La satisfaction est mise en place par les principes naturels : affection, alimentation, soins. La compensation est mise en place par les mécanismes culturels : biens de consommation, argent, etc.
Dans le développement « normal » de l’individu, les premières années sont faites pour obtenir l’autonomie émotionnelle. Or cette dernière ne peut s’acquérir que par l’attention, l’affection, le rassurement. Par ces actes sensoriels (tactile, vocal…), l’individu prend conscience de ce qui est réellement un danger de ce qui n’en est pas. La troisième partie de son enfance (l’adolescence) doit le faire confronter à lui-même, dans un rite initiatique, afin qu’il prenne conscience qu’il n’a besoin que de lui-même pour subvenir à ses besoins, physiologiques et émotionnels.
Notre société fondamentalement culturelle a trouvé un moyen illimité pour faire en sorte que nous « consommions » de l’attention, de l’affection, et ce jusqu’à la fin de nos jours. Le seuvrage affectif ne s’effectuant plus dans les proportions physiologiques requises, elle est compensée par des ersatz tactiles, ludiques, des placebos nous maintenant dans un état de névrose permanent.
Au nom du progrès, on oblige les gens à consommer, les femmes à travailler, les bébés à être gardés par des personnes de moins en moins à même de faire leur travail de maman de substitution. Merci à ces psychanalystes et psychologues d’avoir centré l’enfant comme un individu et à instaurer des relations exclusives contraires à tous les gynécées antiques et actuels. Merci aux hommes de loi de toujours vouloir protéger certains et responsabiliser les autres. Merci à cette culture d’avoir fait de nous des dépendants perpétuels, des drogués de la consommation, de l’argent, de l’administration.
En clair, notre cerveau fonctionne de plus en plus en mode compensation, car il lui est impossible d’être satisfait. Cela pourrait faire de nous des hommes libres et responsables, au sens étymologique.